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Yvonne Ferrari

La période des fêtes est passée, les décorations de Noël sont rangées jusqu’à l’an prochain et la vie à bord de l’Africa Mercy a retrouvé sa routine habituelle. 40 nouveaux membres de notre équipe sont arrivés, dont un grand nombre était déjà venus précédemment. Pour les autres c’est la première fois. Il y a des spécialistes, docteurs, anesthésistes et chirurgiens venus du monde entier. Sur le navire, ce furent pour beaucoup de chaleureuses retrouvailles.

Nous attendons également de nombreux nouveaux patients. Ils ont déjà été examinés et ont reçu la date de leur opération. Dans les longues files d’attente il y a toujours de nombreux parents avec leurs enfants. Nombre d’entre eux sont nés avec une malformation comme une fente labiale ou un pied bot, mais il y en a aussi beaucoup avec de graves brûlures dues à une chute dans un feu ouvert. J’ai vu des petits enfants affreusement blessés, pleins de cicatrices, la peau racornie. Certains ne pouvaient presque plus bouger leurs bras ou jambes à cause du tissu cicatriciel résultant de brûlures mal soignées. Les spécialistes en transplantation de peau le font admirablement bien, mais cela prend toujours beaucoup de temps et il faut souvent 3 à 4 opérations chez le même patient.

Les premiers jours sont angoissants pour ces enfants, mais ensuite ils s’adaptent assez facilement et jouent entre eux. La mère ou un autre membre de la famille reste avec l’enfant dans l’hôpital. Cette personne dort sur un matelas en dessous du lit de l’enfant.
Nous avons revisité l’hôpital pour enfants local. Hélas, il n’y a pas d’amélioration. Il n’y a toujours que deux couveuses, qui sont souvent en panne, pas de moustiquaires sur les petits lits, les fenêtres n’ont ni vitre ni moustiquaire et bien sûr, il n’y a pas d’air conditionné. Deux bébés étaient nés ce matin-là. Ils étaient couchés dans le lit de leur maman (ici, il n’y a pas de lit pour bébés) et n’avaient pas l’air en bonne santé. L’un avait de sérieux problèmes respiratoires. Il y avait aussi une toute petite fille chétive de 3 ou 4 ans atteinte de malaria et qui avait été inconsciente pendant cinq jours. Une bien triste situation.

Pendant le week-end j’ai visité l’orphelinat local avec un autre groupe. Nous avons eu un accueil enthousiaste. Nous avions quelques petits jeux de bricolage avec nous. Visages réjouis et beaucoup de fous rires. Pourtant, je ressentais leur souffrance de ne pouvoir grandir dans la chaleur d’une vraie famille. Quelqu’un m’a raconté que certains enfants ont des parents mais que ceux-ci sont trop pauvres pour pouvoir s’en occuper.
J’ai été déplacée dans le « Food Service », une énorme différence avec le service « Hospitality » ! A bord, chaque bénévole preste 40 heures/semaine. Toutefois, dans le restaurant du « Food Service » la journée de travail est divisée en trois services – déjeuner, dîner et souper – avec chaque fois 2 heures de pause. Ma journée de travail commence maintenant à 05h30, je me lève donc à 4h45. Nous commençons par la préparation du petit déjeuner. La cuisine et le restaurant sont bien équipés, de façon professionnelle.

Le petit déjeuner est souvent assez agité vu qu’on ne dispose que d’une heure de temps. 500 personnes doivent déjeuner entre 6h30 et 7h30. Les patients dans l’hôpital reçoivent leur repas séparément. Le même scénario se répète le midi et le soir. Quand tout est rangé, nous terminons normalement vers 19h30.

Hier j’ai passé une heure dans le “Hope Center”. Il se trouve à 45 minutes de promenade du navire en empruntant un sentier côtier. J’y ai parlé avec les patients et le staff, leur demandant d’où ils venaient et comment prononcer leur nom. J’ai vu combien ils étaient heureux d’avoir de la visite, ils parlaient tous ensemble, tentant de capter mon attention.

Hier j’ai été bouleversée à la vue d’un homme avec une horrible tumeur sortant d’une orbite. Le médecin spécialiste de « Mercy Ships » m’a raconté qu’il allait opérer cet homme, mais qu’il devait attendre la venue d’un ami chirurgien. L’opération était tellement spéciale qu’elle nécessitait deux chirurgiens.

Dans le jardin du “Hope Center” j’ai vu des enfants en revalidation qui faisaient des exercices pour réapprendre à marcher. Certains avaient encore les pieds ou jambes dans des bandages, d’autres avaient des attelles ou un plâtre. Après les exercices ils venaient tous à moi, entourant mes jambes de leurs petits bras, grimpant sur mes genoux, tirant mes cheveux, essayant de mettre mes lunettes qui pendaient à un cordon. Ce faisant, ils m’étranglaient presque avec celui-ci, ce qu’ils semblaient trouver très amusant ! Quand les infirmières sont venues chercher les enfants pour les reconduire dans leur dortoir j’étais épuisée par leur babillage constant, leurs fous rires et leur énergie débordante !